Le rapport de Brodeck, Philippe Claudel

L’histoire

Brodeck est un homme pas comme les autres. Il vit dans un petit village reculé, en Pologne, en Allemagne? On ne sait pas vraiment. Ce que l’on sait c’est que Brodeck n’est plus le même. Déporté dans un camp parce qu’il était juif, il est revenu solitaire et torturé par ce passé si lourd. Il vit avec sa femme Emelia et sa fille Poupchette. Il parcourt la campagne et prend des notes sur les fleurs, les animaux, les arbres. C’est ainsi qu’il gagne sa vie.

Un soir, un étranger débarque dans ce village perdu. Très vite, on l’appelle « l’anderer », l’autre. Il se promène, ne parle presque pas et passe son temps à dessiner, faire des croquis. Bientôt, il éveille la méfiance des villageois qui s’en prennent à lui et le tuent simplement sans pitié, sans remords. Brodeck n’était pas là, il apprend la nouvelle et c’est à lui, le lettré du village, que l’on confie la tâche de faire un rapport sur « l’incident ». Brodeck mène alors son enquête et au fil des pages il révèle ce que les villageois ont toujours voulu cacher.

Mon avis

Encore une fois, je suis charmée et envoûtée par l’écriture de Philippe Claudel. Dès les premières pages, je suis happée par son style qui me parle, au plus près de mon coeur. C’est ainsi et presque inexplicable.

Philppe Claudel a le don de peindre des natures envoûtantes, presque de conte de fée dans lesquelles on aime se perdre aux côtés des personnages. Ce village fermé sur lui-même, qui ne veut pas révéler ses secrets, nous plonge dans une ambiance calfeutrée. Et au fur à mesure que l’on tourne les pages, on se rend compte que cette nature est bien cruelle, à l’image des hommes qui tentent de la dompter.

La tension monte de plus en plus. Avec Claudel tout commence par un non-dit, un sous-entendu qui laisse imaginer, présager le pire. La langue du personnage se délie au fur et à mesure comme s’il fallait l’apprivoiser au fil des pages. Brodeck, cet homme si bon, m’a beaucoup émue. Il se livre par bribes, lorsque les pensées qui l’assaillent lui font trop mal et qu »il ne peut plus se taire. C’est un homme brisé, confronté à l’enfer qui se confie. C’est peut-être d’ailleurs le meilleur parmi les hommes lui qui sait encore donner et recevoir de l’amour de la part de sa femme, de sa fille et de sa chère Fédorine.

L’écheveau se dénoue et le lecteur ne peut plus faire autrement qu’avancer parmi la cruauté humaine. Les villageois sont des brutes qui cherchent à tout prix un bouc émissaire. Ils ne peuvent supporter de se voir tels qu’ils sont. La réalité est trop dure. Tuer pour faire taire est leur seule réponse. A aucun moment Brodeck ne juge. Il se contente de relater, de raconter. Il mène son chemin et sa mission jusqu’au bout. Et bien malgré lui, il nous apprend l’indicible, l’inavouable. Le lecteur ne peut y échapper et souffre en silence à ses côtés.

C’est l’amour que cet homme porte aux femmes de sa vie qui m’a le plus marquée. Malgré la souffrance, la colère qu’il pourrait ressentir, il ne cherche pas à se venger, ni à comprendre. Il vit pour sa fille, sa Poupchette.Les passages entre Brodeck et sa fille sont émouvants parce qu’ils débordent d’amour.

Un livre magnifique qui ne m’a pas laissée indemne. Très dur parfois quand Brodeck raconte son drame personnel et la folie des hommes. Que dire de plus?

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