Les Mal-aimés de Jean-Christophe Tixier

Les Mal-Aimés de Jean-Christophe Tixier,

Publié aux éditions Le Livre de Poche,

2021, 312 pages.

1884 : Une maison d’éducation surveillée ferme ses portes. Des adolescents décharnés quittent le bagne sous le regard des paysans qui sont aussi leurs geôliers.
Quinze ans plus tard, l’ombre du bâtiment plane toujours. Les habitants ont beau feindre de l’ignorer, les terribles souvenirs qu’il contient continuent d’étouffer leur communauté. Aussi, lorsqu’une jument se putréfie ou qu’un troupeau de chèvres est décimé par une maladie, il faut des responsables. Les habitants, tous coupables ou complices de monstruosités, s’accusent du mal qui rôde. Dans ce chaos, c’est aussi l’itinéraire de Blanche, une jeune-fille abusée par son oncle, qui tente d’échapper au fatalisme et à la violence à laquelle elle est destinée.
Nous sommes aux confins des Cévennes, là où la religion règne en maître. Là où la terre est dure et le climat rude.

Jean-Christophe Tixier place son intrigue au cœur des Cévennes, en 1884. La maison d’éducation vient de fermer ses portes. Une longue file d’adolescents décharnés quittent le bagne dans lequel ils ont soufferts pendant des années, sous le regard des paysans. C’est alors le moment pour eux de faire face aux fantôme et d’accepter leur vérité.

Les chapitres vont ainsi alterner. Il y a Blanche, l’orpheline, recueillie par son oncle Ernest qui la viole sans cesse. Elle ne compte plus les grossesses interrompues, les enfants morts-nés. Il y a aussi Léon et sa femme ainsi que leur apprenti Étienne qui redoutent par-dessus tout la malédiction des enfants morts au bagne. Il y aussi ce médecin, revenu sur ses terres natales, fuyant la ville et cherchant du réconfort dans l’alcool.

Jean-Christophe Tixier nous livre ici un roman d’une noirceur sans fond. Pas une once d’espoir à l’issue de cette lecture. Les personnages sont englués dans leurs échecs et cette vie rude qui n’offre rien. La terre est pauvre, aride. Les paysans la cultivent et suent sang et eau pour presque rien. Partagés entre une religion manichéenne et des superstitions d’un autre temps, ces hommes et ces femmes incarnent la souffrance la plus totale.

Avec ce roman noir rural, l’auteur nous brosse le portrait de personnages rudes. C’est une lecture éprouvante qui laisse entrevoir ce que l’homme a de plus sombre en lui. Que dire de La Cruere, cette femme qui s’improvise nourrice pour toucher les aides de l’État? C’est un puits noir sans fond mais d’une justesse folle. J’ai été happée par cette folie humaine, parfois par cette perversité qui m’a menée au bord de la nausée, c’est vrai. C’est d’un réalisme fort.

« Les Mal-aimés » est un roman rude qui narre des vies remplies de malheur. Un roman d’une noirceur sans fin.

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