Miss Charity, Marie-Aude Murail

L’histoire

Charity Tindler est une jeune Anglaise. Elle naît au début du 19ème siècle dans une famille bourgeoise désargentée. Son père, en grand bourgeois, se refuse à travailler (trop dégradant); sa mère passe son temps à courir les thés de la région organisés par d’autres familles distinguées et fortunées.
La jeune Charity grandit dans cette drôle d’atmosphère. Privée de l’amour paternel et maternel, elle fait son éducation auprès de sa chère nourrice Tabitha qui passe son temps à lui raconter des histoires de fantômes. Miss Charity développe ainsi très tôt un goût pour le mystère. Comme elle s’ennuie dans sa nursery, elle se prend de passion pour le dessin. Elle aime particulèrement reproduire les plantes et les arbres qui l’entourent mais avant tout les animaux. Elle qui n’a jamais reçu de démonstration d’affection, elle recueille toutes sortes d’animaux égarés, blessés, mal en point qu’elle retape tant bien que mal. C’est ainsi qu’un jour, sa gouvernante achète un lapin destiné à être engraissé et mangé. Charity s’attache à l’animal et le baptise « Master Peter ». Elle lui apprend des tours comme compter, faire le mort,…. Mieux, elle le dessine et le met en scène dans de charmantes histoires qu’elle essaie de vendre à des éditeurs peu scrupuleux. Une artiste est née: Charity sera dessinatrice ou femme de lettres, une tare à l’époque. Une femme ne doit pas travailler mais plutôt penser à se marier sous peine de devenir vieille fille. Vendre ses oeuvres revient à vendre son corps. Dans une société marquée par les apparences et les convenances, Charity passe pour une orignale en quête de liberté….

 

Avec Miss charity, attendez vous à manipuler à chaque fois un livre de 2 kilos!!! Pas facile pour lire tranquille dans son lit ou pour emmener en voyage.
On pourrait penser que ce livre est destiné aux enfants mais il convient parfaitement aux adultes. A travers le destin de Miss Charity, c’est tout le prisme d’une société figée dans ses convenances qui est observé. En effet, Charity naît dans une vieille famille bourgeoise où les principes et les apparences sont rois. Il faut toujours être convenable aux yeux de la société. Aussi lorsque Charity commence à dessiner, sa famille s’inquiète sérieusement. Elle est traitée d’originale. Sa mère prend plaisir à lui rappeler qu’elle finira vieille fille. En effet, une femme ne doit pas travailler et surtout ne pas gagner sa vie grâce à son art ou son talent. Il faut trouver un époux de bonne réputation et consacrer sa vie à sa famille. Le personnage de Charity dénote considérablement dans cette bonne société. Alors que ses cousines vont de bal en bal pour trouver le mari idéal, Charity préfère regarder et dessiner les danseurs. Marie-Aude Murail parvient, à travers son personnage, à montrer la condition des femmes dans cette société anglaise du 19ème siècle.
A travers l’histoire de Miss Charity on décrypte également l’histoire réelle de la célèbre Béatrix Potter dont le talent de son vivant n’a jamais été reconnu car elle était une femme. Si Miss Charity se prend d’affection pour tous les animaux mal en point qui passent à sa portée, c’est parce qu’elle manque profondément d’amour. Son talent naît de ce manque abyssal. C’est une artiste qui doit faire doublement ses preuves: auprès de sa famille, auprès d’une société patriarcale dominé par une idéologie masculine bien ancrée dans les mentalités. Sans verser dans le féminisme, Marie-Aude Murail dresse une panorama réaliste de la société de ce siècle. Mais elle n’est jamais défaitiste: Miss Charity possède un humour bien anglais qui lui permet à chaque fois de rebondir sur ses échecs.
Enfin, il faut noter la qualité graphique du livre. Les textes sont agrémentés de magnifiques illustrations de Philippe Dumas (d’où la grosseur du livre).

 

Bref, je vous recommande la lecture de Miss Charity: un vrai régal pendant ses vacances de Noël!!

Une réflexion sur “Miss Charity, Marie-Aude Murail

  1. Pingback: Miss Charity - « Lire par Elora

Laisser un commentaire