Ceux qui sauront, Pierre Bordage

Auteur: Pierre Bordage

Titre: Ceux qui sauront

Éditions: Flammarion

 

 

 

 

 

Et si le passé avait été différent, quel serait notre présent ? Un monde scindé en deux.
Les riches détenant le savoir, les pauvres condamnés à l’ignorance. Il y a ceux qui acceptent, s’oublient dans le silence. Mais il y a ceux qui se battent pour qu’une société plus juste émerge enfin.

En 2008, en France, rien n’a changé depuis des siècles. Le gouvernement en place est une monarchie. Les riches, aristocrates et autres, détiennent le pouvoir et le savoir. Les pauvres, appelés « les cous noirs », travaillent: ils constituent la majorité, le peuple. Pour éviter des soulèvements, les riches ont interdits aux pauvres d’accéder au savoir. Humiliés, soumis et ignorants, les pauvres sont là pour servir les riches. Mais la résistance se met en place. Un peu partout, des écoles clandestines voient le jour. Et puis il y a tous ces jeunes gens, comme Jean,  qui ont soif d’apprendre afin de s’élever et de sortir de la misère, …

 

Avec ce roman, Pierre Bordage plonge son lecteur dans le genre de l’uchronie. Il s’agit d’imaginer le monde tel qu’il serait si le cours de l’Histoire s’était déroulé autrement.

Dans ce premier tome (la saga en compte trois), l’auteur met en place tous les éléments et les personnages principaux qui permettent de comprendre ce nouveau monde. J’aime beaucoup cette idée de pouvoir réécrire l’Histoire et de se demander, dans ce cas précis, ce que la France serait devenue si la révolution de 1789 n’avait pas eu lieu. Car c’est bien de cela qu’il s’agit au début du roman. En effet, Pierre Bordage prend comme hypothèse que la révolution française a été un échec. De nombreuses révoltes ont été menées par la suite (dont la plus récente en 1982) mais toujours sans succès.

Ainsi, la France est toujours gouvernée par un roi et une poignée d’aristocrates. Le sujet est bien choisi car l’auteur en profite pour montrer que cette société a peu évolué. En effet, les riches refusent le progrès qui serait bénéfique à tous et qui permettrait aux plus pauvres de sortir de leur misère. Ainsi, l’électricité reste cantonnée à Versailles et à ses environs, lieu du pouvoir, tandis que Paris est devenue une ville dangereuse et risquée. Internet commence à émerger même si toutes les données sont soumises à la censure avant d’être librement consultables. Le but est d’écraser le peuple, de l’humilier et de le soumettre.

Pourtant, parmi la population, l’auteur imagine des personnages qui se rebellent. L’idée de l’école pour tous émise par Jules Ferry a bien sûr été rejetée puisque le savoir donne accès au pouvoir. Et pourtant une poignée de rebelles s’en empare afin d’éduquer le peuple. C’est dans le contexte d’une école clandestine que le lecteur fait la connaissance de Jean. Fils de « cous noirs », il a compris que le seul moyen d’en finir était d’étudier. C’est par les livres et le savoir qu’il compte bien s’en sortir.

La description qui nous est faite des conditions de vie des « cous noirs » est misérable et sombre à souhait. C’est dans un Paris sale et grouillant que le peuple évolue: crimes, rackets, clans en tous genres font le quotidien des travailleurs miséreux. La capitale a bien mauvaise réputation.

L’auteur nous montre également l’autre côté du miroir, à Versailles, lieu de tous les pouvoirs et de tous les excès. Clara, une jeune aristocrate, ne rêve que d’une chose: s’évader et voyager. Oui mais voilà, ses parents la destinent à épouser un fils de bonne famille. Même si au départ, Clara peu sembler antipathique et pimbêche sur les bords, le lecteur se rend compte qu’elle n’est pas comme toutes les autres jeunes filles de son milieu.

Alors qu’elle s’apprête à rencontrer son promis, Clara tombe sur Jean. Ces deux-là n’ont rien en commun et pourtant: l’Histoire va les lier d’une façon ou d’une d’autre.

Outre les personnages qui sont attachants, j’ai beaucoup apprécié la façon qu’à l’auteur d’imaginer comment notre société aurait pu évoluer. Même si certaines choses me semblent exagérées (à la Germinal de Zola), l’ensemble reste cohérent. Ode au savoir et à la connaissance, ce premier tome s’avère convaincant. Je ne sais pas si je me lancerai dans l’achat des deux autres tomes (pas encore disponibles en poche) mais si l’occasion se présente, je les lirai avec beaucoup d’intérêt tant la suite des événements semble prometteuse.

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