Persuasion de Jane Austen

 

 

Persuasion de Jane Austen,

Publié aux éditions 10/18,

2016, 317 pages.

 

Depuis quand une jeune fille a-t-elle besoin qu’on lui dicte sa conduite ? Si elle s’est laissé persuader trop jeune de rompre ses fiançailles, Anne Eliott n’est plus dupe. Et lorsque son ancien amant réapparaît, auréolé de gloire, l’heure n’est pas à l’indécision. Pour Anne, il est temps de faire fi des convenances et de la vanité de son entourage !  » A lire yeux baissés et genoux serrés pour goûter en secret le délicieux plaisir de la transgression des interdits.

Persuasion est un titre qui ne m’a pas totalement convaincue. Loin du mordant d’Orgueil et préjugés, j’ai trouvé ce roman lent à se mettre en place. Malgré tout, j’en retiens une belle histoire d’amour dans laquelle l’héroïne doit passer outre son passé et sa rancœur pour ouvrir les yeux.

Anne Eliott est la troisième fille d’un baronnet, qui se la joue grave et qui n’accorde de prix qu’au rang social. Oui mais, voilà, ce gentil baronnet est obligé de louer son domaine de Kellynch pour subvenir à ses dettes. Avec son autre fille Elizabeth, il se rend à Bath pour sauver les apparences tout en louant sa demeure à un amiral réputé.

De son côté, la pauvre Anne, dont tout le monde se fiche comme d’une guigne, doit rejoindre sa deuxième sœur Mary et ses insupportables gosses. Et oui! La pauvre Anne a toujours été mise de côté. C’est celle qui est désignée comme la moins belle, la moins utile, bref celle qui ne se mariera jamais. En un mot: le boulet! Mais ce qu’on apprend de fort intéressant, c’est qu’Anne a rompu ses fiançailles, il y a de ça huit ans sous la pression de son père. L’homme qu’elle aimait n’était pas « assez bien » pour la famille et comme Anne a peu, très peu de caractère, elle a obéi sagement à son affreux papa. La voilà donc célibataire à 26 ans, autant dire une vieille fille.

Or par le plus grand des hasards, l’amiral qui emménage à Kellynch est le beau-frère de Frederick Wentworth, l’ex-fiancé. Anne renoue avec le beau jeune homme. L’aime-t-elle toujours? Et lui, éprouve-t-il encore des sentiments? Voilà l’intrigue de Persuasion qui se noue.

Loin d’une Elizabeth Bennet, Jane Austen nous présente ici une héroïne un peu molle, discrète et pas vraiment jolie. Trop souvent rabrouée par son père et ses sœurs, elle passe au second plan et a renoncé à toute idée de bonheur par manque de persuasion envers sa famille. Les passages où elle se demande si elle éprouve encore des sentiments pour Frederick sont assez nombreux. Plutôt que l’action, Anne est une jeune femme qui réfléchit et analyse beaucoup les choses. Le roman de Jane Austen est ici centré sur la psychologie du personnage qui doit se battre contre elle-même pour s’avouer qu’elle n’a jamais oublié son ex-fiancé. Si l’issue de l’histoire est prévisible et si l’héroïne est un peu cruche (j’ai souvent eu envie de la secouer), j’ai grandement apprécié la peinture faite par Jane Austen de la société de l’époque.

Alors bien sûr, Miss Austen est moins mordante ici. Les piques ironiques concernent le plus souvent le baronnet (ridicule à souhait!). Mais la romancière n’en oublie pas de critiquer une société où les femmes attendent tandis que les hommes agissent; où les femmes n’ont pas le droit d’hériter directement et ne peuvent compter que sur le mariage pour gagner une position stable et sécurisante. Il faut lire à travers les lignes et voir cette critique à travers le portrait des sœurs Henrietta et Louisa, du baronnet Eliott qui ne cherche qu’à caser ses filles pour asseoir sa réputation!

Si Persuasion ne m’a totalement conquise c’est à cause de son héroïne trop discrète et en retrait. J’ai cependant goûté la langue de l’auteur toujours aussi belle et sa critique à moitié voilée de la société de son temps.

10 réflexions sur “Persuasion de Jane Austen

  1. Une chronique géniale ! J’ai adoré la façon dont tu en as parlé, c’était plein de petites remarques ironiques qui m’ont bien fait rire 😀
    Je suis totalement d’accord avec toi sur ce que tu dis de ce livre, il est très loin d’O&P, de R&S (et même de Northanger je trouve :P) mais l’héroïne, bien que beaucoup plus effacée, a fini par m’être très attachante, sans compter le capitaine Wentworth qui, s’il ne vaut pas Darcy, est assez romantique dans son genre 😛
    Chronique très chouette, vraiment, et très beau blog aussi, je vais rester un instant ici pour faire un petit tour 😉
    bisous !

  2. Ce roman fait partie de ceux que je souhaite découvrir cette année. Pour le moment j’ai lu trois Jane Austen : Orgueil et préjugés, Raison et sentiment ainsi que Northanger Abbey. J’ai donc hâte de découvrir celui-ci.

  3. Je n’ai lu qu’Orgueil et préjugés et Northanger abbey, mais je pense qu’O&P a été le summum de la maîtrise de l’ironie et en caractères affirmés, difficile de s’en passer dans les autres écrits de Jane Austen ! C’est ce que j’ai ressenti avec Northanger abbey mais visiblement c’est plus prononcé dans Persuasion. Ceci dit je me laisserai quand même persuader par ce dernier, je ne me lasse pas de l’écriture de Jane Austen ! 😉

  4. En tant qu’adepte pénible de l’auteur et de ce roman en particulier, je ne suis pas d’accord avec toutes tes remarques. Je trouve au contraire que Jane Austen y va très fort dans les sarcasmes dans ce roman que j’ai relu récemment. C’est l’un de ceux que je trouve les plus drôles. Presque tous les personnages y passent, à l’exception du couple central.
    Quant à Anne, elle est très posée et réfléchie, mais je trouve qu’Austen montre bien qu’avec toutes les règles de bienséance, une femme a un champ d’action très limité, même si son bonheur est en jeu.
    J’imagine qu’on est plus ou moins sensible à tel ou tel type de personnage, mais comme j’aime beaucoup ce roman, je voulais le défendre 😉

    • Coucou! Oui tu as raison de le défendre. Je trouve cependant que le sarcasme est peut-être plus diffus, plus difficile à cerner que dans Orgueil et Préjugés. Je suis d’accord avec toi sur la question de la femme soulevée par Austen. Merci pour ton commentaire constructif 🙂

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