La saison des ouragans de Fernanda Melchor

La saison des ouragans de Fernanda Melchor,

Publié aux éditions du Livre de Poche,

2023, 281 pages.

Yesenia a vu son cousin Luismi, accompagné de Brando, sortir de la maison de la Sorcière avec un corps. Il y a également Munra, le beau-père boîteux de Luismi, qui conduisait le camion le jour de l’assassinat, un simple exécutant dit-il aux policiers. Luismi vit avec Norma, une jeune fille de 13 ans. Elle a été admise à l’hôpital pour d’importants saignements à la suite d’une visite chez la Sorcière. Brando, lui, a besoin d’argent pour ses projets. Un trésor serait caché dans la maison de la femme maléfique. Autant de raisons pour commettre l’irréparable et autant de perspectives qui nous plongent dans la campagne mexicaine où la misère, la drogue et la violence poussent les gens à la folie autant que l’extrême chaleur qui s’installe. Ce qui, en plein mois de mai, semble annoncer que la saison des ouragans sera violente…

On a retrouvé le corps de la sorcière dans un marais. Il s’agit d’un meurtre, c’est sûr. Qui pouvait en vouloir à ce personnage étrange que les femmes venaient voir pour faire disparaître une grossesse problématique, faire revenir l’être aimé ou soigner une mauvaise toux? Qui en avait après cette sorcière qu’on soupçonnait de frayer avec le diable? A rebours, le narrateur nous conduit sur la piste de plusieurs personnages…

La Saison des ouragans est un roman très violent, ancré sur la misère d’un bourg, au Mexique, abritant quelques âmes. Les habitants n’ont rien à part l’alcool, la drogue pour oublier un quotidien fait de violence et de famine. C’est un roman effrayant de ce point de vue là, un choc social.

Le style de l’autrice est aussi difficile à appréhender au départ. En effet, elle ponctue très peu, les dialogues ne sont pas annoncés. Une fois que l’on a pris le coup, ça va tout seul mais il faut un temps d’adaptation.

Le lecteur va donc remonter la piste de trois suspects. Il y a Norma, cette fille de treize ans, enceinte, qui cherche à avorter. Puis il y a Luismi, son petit ami, complètement drogué. Munra, un routier. Et enfin Brando qui cherche à se faire de l’argent pour partir de son taudis et qui a appris que la sorcière cachait un trésor. A chaque personnage, j’ai eu l’impression de m’enfoncer un peu plus dans la misère. Certains passages sont très crus. On y parle beaucoup de sexe tarifé, certaines femmes ne subsistant que de la prostitution. Si l’on est perdu au départ entre les différents personnages, tout se met en place à la fin à la manière d’un puzzle, ce qui permet de reconstituer l’enquête.

L’autrice met tout son cœur ici pour exposer la situation des femmes, toujours reléguées au rang des vaincues, victimes des coups, des abus, du mépris. Elle dénonce la société profondément machiste qui ne laisse aucune place aux autres, qu’on soit femme, homo, trans. C’est parfois affligeant et désespérant mais si vrai.

« La Saison des ouragans » est un roman torturé, violent, souvent difficile. J’ai pourtant été séduite par la plume de l’autrice, son talent à tisser une histoire vraie et révoltante.

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